Un verre de Pinot Noir dans un restaurant improbable, puis la rencontre des producteurs pendant Vinea On Tour. Parfois la dégustation prend ce tour-là.
Alexandre Caldara
La découverte d’un vin qui échappe à la prise de notes. Hommage à un sentiment rare, celui de se trouver en présence d’un bon vin et de bonnes personnes. On parle souvent des arômes d’un vin parfois de façon détaillée, trop ritualisée. Se concentrer sur un vin pendant une dégustation peut avoir quelque chose d’indéfinissable, qui vous sort du monde, vous donne de la force. Mais ici on va parler d’autre chose, de la sensation de tomber sur un vin généreux. Un Pinot Noir 2016 de Jean-Louis Mathieu, un soir dans un improbable restaurant de montagne. On commence par noter scrupuleusement nez floral, parfum de rose, puis on abandonne vite pour écrire simplement: bon.
Quelques jours après, à Vinea On tour, dans le coin gauche du salon du Mandarin Oriental, on rencontre un couple. Un homme au large sourire, convivial qui tutoie immédiatement et son épouse tout aussi enjouée avec une pointe d’accent anglais. Il dit: «Tu verras le Sauvignon blanc c’est mon dada.» Elle nous regarde prendre des notes, comme s’il s’agissait d’un évènement. Elle raconte: «Un soir je mange avec un ami, il commence à faire comme vous, j’ai trouvé cela très beau, j’ai compris bien plus tard qu’il écrivait pour un guide.» On avoue à Jean-Louis Mathieu qu’on a bu un de ses Pinots Noirs quelques jours auparavant. Il barjaque une babiole spontanée du genre: «C’est pas vrai.» On lui demande pourquoi le Sauvignon blanc est son dada, il sert le millésime 2017, il raconte: «J’ai planté la première vigne en 1994. Je l’aime comme ça balancé, pas exubérant.» On se sent bien avec ce vin-là ou plutôt ce dada-là et son histoire sur les papilles.
On adore sa Syrah 2017, croit percevoir de la violette, de la figue. On laisse tomber. Et si simplement les vins de Jean-Louis Mathieu étaient bons… Peut-être certaines fois, quand on rencontre pour de vrai un vin, puis des personnalités sincères, on peut ne pas chercher plus loin. Cette phrase que nous a tant répété notre père, qui nous exaspère. Et pourtant, on se donne le droit de trouver l’instant bon.